Analyse des Malversations Financières à l'AGEFAU : L'Implicite Responsabilité de Choguel Maïga
Le 30 décembre dernier, un rapport accablant du Bureau du Vérificateur Général (BVG) plongeait le Mali dans une nouvelle controverse. Au cœur de cette tourmente, l’Agence de Gestion du Fonds d’Accès Universel (AGEFAU), créée pour promouvoir l’accès universel aux télécommunications et aux technologies de l’information. L’ancien Premier ministre Choguel Maïga, en sa qualité de Président du Conseil d’Administration (PCA) de l’AGEFAU entre 2020 et 2023, est pointé du doigt pour avoir, par son inaction ou sa complicité implicite, permis des malversations financières d’une ampleur préoccupante.
Dans sa fonction de PCA, Choguel Maïga portait la responsabilité ultime de la supervision stratégique et financière de l’AGEFAU. Son rôle n’était pas simplement honorifique : il devait garantir une gestion rigoureuse et veiller à ce que les ressources publiques soient utilisées exclusivement pour leur mission originelle, à savoir combler la fracture numérique. Mais le rapport révèle une tout autre réalité. Des décisions validées sous sa présidence ont non seulement compromis cette noble mission, mais aussi causé des pertes financières massives.
Parmi les irrégularités majeures, un prêt de 20 milliards de FCFA octroyé au Trésor Public en 2020 figure en bonne place. Officiellement, ces fonds devaient financer des dépenses liées à la lutte contre la COVID-19. En pratique, ils furent détournés pour payer des salaires des fonctionnaires, une dépense totalement étrangère aux objectifs de l’AGEFAU. Bien que Choguel Maïga n’ait pas initié cette demande, il l’a approuvée, créant un précédent dangereux pour une institution censée rester indépendante. Ce prêt, jamais remboursé, représente une perte colossale pour l’Agence et un détournement de ses priorités essentielles.
À cette affaire s’ajoutent les fameuses « dépenses de souveraineté ». Ces montants, non prévus au budget, furent attribués lors de missions officielles, sous des motifs difficilement justifiables. Lors d’une mission d’un jour à Konobougou, par exemple, 15 millions de FCFA furent versés au lieu des 75 000 FCFA réglementaires. Pour une autre mission de deux jours, 20 millions de FCFA furent déboursés, alors que seuls 150 000 FCFA auraient dû être alloués. Ces dépenses répétées, bien que présentées comme exceptionnelles, trahissent une gestion laxiste et une tolérance évidente de la part du PCA.
Le rapport du BVG met également en lumière des marchés publics attribués à des prix largement surfacturés. Qu’il s’agisse de véhicules ou d’équipements, les montants approuvés par le Conseil d’Administration sous la présidence de Choguel Maïga dépassaient de loin les mercuriales officielles. Ces transactions, qui ont coûté à l’AGEFAU près de 58 millions de FCFA, témoignent d’un système où les règles de transparence étaient manifestement négligées.
Face à ces faits, deux hypothèses émergent quant à l’attitude de Choguel Maïga. La première suggère une couverture passive : il aurait sciemment ignoré les dérives pour préserver un équilibre politique ou personnel. La seconde, plus grave, suppose une participation indirecte à ces pratiques, avec des bénéfices potentiels. Si le rapport ne fournit pas de preuves directes d’enrichissement personnel, l’ampleur des irrégularités soulève des soupçons légitimes.
Analyse faite par Aboubacar Ouedraogo pour AESinfo